Avis aux acquéreurs potentiels, aux skippers, convoyeurs et équipiers possibles ou probables, aux amoureux de ce bateau... Le trimaran « Fine Pitch » est un Echo 36 de course pluôt que de croisière sur plan Dick Newick pour le flotteur et Nick Barlow pour le mât aile. Ce trimaran fut construit en 1991 chez Boatshop.inc aux Philippines, chantier à la piètre réputation mais heureusement la construction de cet Echo 36 "Fine Pitch" a été supervisée par un constructeur suédois réputé qui lui a assuré une qualité de facture impeccable. Il a ensuite été skipper en course croisière en Thailande où son équipage s'est distingué à trois reprise en remportant la fameuse King Cup Regatta. Une fuite sur l'aile tribord a nécessité un important chantier de refit en 2001 à Phuket où le bateau était basé. La réparation est invisible extérieurement et est structurelle. "Fine Pitch" a ensuite été acquis par un Français qui l'a convoyé de Phuket à Maurice en juillet 2003. Puis, il a été échangé contre un Sun Kiss 47 âgé à la Réunion en 2005. Ce trimaran est actuellement à vendre à la Réunion. Il est visible au port de Saint-Pierre. La Réunion ne présente absolument aucun intérêt pour la navigation de plaisance ou de compétition à la voile, il n’y a aucun mouillage abrité, aucune de destination plaisante et aucune course d’intérêt pour ce type de voilier. La destination la plus proche est l’île Maurice mais la traversée de 180 milles nautiques au près est loin d’être une promenade de santé, l’Océan Indien étant malheureusement fidèle à sa mauvaise réputation. Houle puissante, alizés modérés à assez fort (20 à 30 noeuds sont de règle) avec violentes rafales hors cyclone bien sûr et mer du vent très cassante en raison du caractère soutenu des alizés. Bref, pas d’amarrinage possible pour l’équipage. Le trimaran Echo 36 "Fine Pitch" est un voilier exigent bien que facile à mener mais il est en mauvais état. Certes la structure n’a pas souffert ou, quand elle a souffert, elle a été réparée avec soin (fuite sur le bras tribord, 2001) mais il n’a pas reçu l’entretien nécessaire pendant les huit dernières années qui viennent de s’écouler. Les descriptifs fournis par les « vendeurs » sont assez élogieux parce qu’en effet, la qualité de construction (plus de 20 ans quand même) a permis à la structure de tenir et en particulier, en ce qui concerne l’intérieur qui donne une excellente impression mais fort trompeuse. Car les frais à prévoir sur le bateau sont réellement conséquents : jugez vous-même. (note : Le contrôle non destructif qui a été fait ne donne qu'une indication. D'autres désordres sont invisibles à une inspection uniquement visuelle.) Mât aile : rail de grand voile électrolysé, peinture cloquée et délaminée, fissure très importante au niveau du vit-de-mulet, fissure au-dessus du capelage, hissage et affalage pénibles et longs, impossibilité de prendre rapidement un ris. Le haubannage a plus de douze ans, il devra impérativement être changé avant toute navigation d’envergure comme un convoyage vers l’Europe, l’Amérique ou l’Australie ou ne serait-ce qu’une traversée vers Madagascar. Les travaux de refit du système mât voile vont s’élever au minimum à 1500 euro. Oeuvres mortes : la peinture est complètement fichue, elle est fissurée partout, elle s’est même décollée par endroits (pont, flotteur tribord) elle est aussi tachée d'importantes coulures de rouille à tribord (problème sur une main courante-cla-pied). Le stratifié verre/epoxy n’est donc plus protégé des UV ce qui a commencé d’entrainer un délitement de la résine époxy et donc une perméabilité du pont et une fragilité du pont au poinçonnement (chute d'objet, marche des équipiers : d'expérience, ce type de problème entraine une dégradation rapide de la résistance mécanique du bois). Or sur ce type de bateau les contraintes de compression et de tension des ailes du au poids des flotteurs sont reprises par le pont ! Cela doit commencer à inquiéter l’acheteur potentiel. Donc, pour vérifier que le bois n’a pas pourri, il faut procéder à un sondage auditif et si possible à une mesure de l’humidité du pont. Mais quoiqu’il en soit une réfection totale du pont est nécessaire d’autant que les propriétaires actuels ont eu la mauvaise idée de visser directement dans le bois des dizaines de pontets plastiques pour installer des trampolines. L’eau ayant la mauvaise habitude de pénétrer partout par capillarité surtout si des efforts cycliques remuent la visserie ce qui est le cas avec les trampolines de multicoques. Des trous ont été percés dans les serre-bauquière en dépit du bon sens mécanique pour faire passer l’alimentation électrique des feux de positions. Il en résulte des fuites au pied du balcon avant, fuite qui mouille la dite serre-bauquière : pas bon du tout. Il y a également une fuite au niveau de la cadène d’étai. Et peut-être à l’arrière au niveau de la platine moteur. Bref, pour le refit des oeuvres mortes, il faudra déposer tout l’accastillage, ces fichus pontets de trampolines, le balcon avant, la structure porteuse du moteur HB dont le mastic-colle PU est fissuré, puis poncer les couches de peintures qui sont toutes atteintes jusqu’au stratifié verre-époxy : un chantier long et délicat. Puis il faudra sans aucun doute refaire un traitement époxy complet du stratifié avec une couche de résine puis deux couches de sous-couche époxy avant application de trois couches minces de peinture de finition PU bi-composant de qualité puis une à deux couches d’antidérapant selon préconisation fabriquant. Enfin, il faudra remonter tout l’accasstillage suivant les règles de l’art si possible avec canon d'epoxy pour retrouver le niveau de qualité de construction originel. Le ticket d’entrée pour ce poste se situe vers les 10.000 euro pour le pont seulement mais les franc-bords sont à inspecter également puisque la peinture se décolle par larges plaques. Accastillage, faire les inox qui sont très oxidés et doivent être à nouveau passivés, ils n’ont certainement pas brillé depuis longtemps. Concernant les panneaux et hublots, c’est simple, il sont tous à changer, tous les clairs de glace n’ont plus de clair que le nom. Les panneaux sont tous complètement faïencés, les hublots sont presque opaques : on devine à peine les flotteurs lorsque qu’on regarde à travers. Ce poste doit dépasser les 500 euro. Manoeuvres courantes : aucun bout n’est surlié de sorte que tous finissent avec des queues de chats dans le meilleur des cas ou se décomptent joyeusement. Le défaut d’entretien et de sens marin est ici flagrant; c’est regrettable quand on connait les contraintes que la vitesse génère sur ce type de voiliers et la nécessité d’avoir des bout’ qui filent proprement pour une navigation en sécurité sur un voilier qu’il est possible de mettre sur le toit par négligence ou manque d’expérience ! Mais qui, bien mené, peut passer les 20 noeuds. Une grande partie des manoeuvres courantes devra donc être changée. Le coût de ce poste doit également dépasser les 500 euro. Un certain nombre de poulies sont de vilaines facture et n’inspire guère confiance : elles seront remplacées par des poulies à bille fortes charges là où c’est indispensable soit encore un billet de 250 euro minimum. Cela commence à faire cher le coup de coeur : 15.000 à 20.000 euro de remise en état avant de pouvoir profiter pleinement du potentiel du bateau. Mais ce n'est pas terminé, il y a encore toute l’électricité du bord à refaire, oui oui pas seulement changer des batteries HS et des panneaux solaires dans un état incroyable, il faut aussi refaire le câblage et la connectique complètement oxydée ; toute l’électronique a déjà plus de quatre ans donc elle ne vaut pas un centime pour un assureur si elle fonctionne vu le black-out énergétique actuel ; le dessalinisateur a été utilisé une seule fois mais comme ce genre d’appareil doit tourner au moins une fois par semaine pour éviter que les pores de la membrane soient bouchés par les bactéries, la membrane doit être changée or c’est la pièce la plus chère de l’appareil donc le poste électricité va dépasser le millier d’euro allègrement. Et il faut désormais y ajouter 60.000 euro de convoyage par cargo pour l’Europe du Sud (devis 2011 - des cargos bigués faisant la liaison Madagascar-Europe sont rares et les pirates sont chers) ou trois mois de navigation au large avec passage de l’Afrique du Sud après traversée de la moitié de l’Océan Indien. Dans un cas comme dans l’autre, il faut trouver les trois mois de disponibilité pour le faire. Bon, il reste l’option convoyage par skipper. Vu que votre compte en banque vient de se délester de 54.000 euro plus 15.000 euro minimum de refit plus tous tes aller-retours en avion bref 70.000 euro au bas mot en restant optimiste, vous allez confier votre jouet avec lequel vous n'avez pas encore joué à un skipper inexpérimenté qui fait une prestation au rabais sans garantie d’arrivée à bon port. Donc vous vous adressez à un skipper reconnu du milieu assuré et déclaré et le devis s’élève quand même à 38.000 euro. Et oui, il y a plus de 7000 milles de navigation soit trois traversées de l’Atlantique ou une trans-Pacifique ! La traversée de l’Atlantique se négociant autour de 12000 à 15000 euro "ma fois lé pa cher 38 mil !" Bon mais vous avez le béguin pour ce bateau, et puis vous êtes sûr de trouver un fan de Dick Newick qui va vous le racheter 200.000 euro cash dès que "Fine Pitch" accostera à Lorient. Si les plans de Dick Newick permettaient de faire fortune mieux qu’à la bourse cela se saurait ! En suite, en surfant un peu sur le net, vous verrez qu’il y a pas mal de Newick qui sont encore et toujours à vendre et la crise s’aggrave et puis pour 100.000 euro, il y a d'autres Newick surement en meilleur état comme "Pados" par exemple. Ce n’est pas grave dites-vous vous trouverez un jeune trader fan de Newick qui va dépenser sur un coup de tête mettons 100.000 euro pour séduire une belle top modèle... La prochaine cagnote du loto s'élève à combien ? Et le père Noël existe alors ? Et pourquoi "Fine Pitch" ne trouve pas d'acquéreur depuis près de 3 ans maintenant ? Rien à faire, vous voulez quand même acheter l'Echo 36 "Fine Pitch" parce qu’il est unique, que c’est le plus bô, et blablabla mais alors que dire de « Chi Machine »? Ah, celui là ne t’intéresse pas, trop cher sans doute : ah bon mais alors es-tu bien sûr de pouvoir revendre "Fine Pitch" plus de 100.000 euro… Vraiment la plaisance est une affaire de passionnés ! N’achètez "Fine Pitch" qu'en connaissance de cause et ne le payez pas plus de 40.000 euro car il s’est échangé pour guère plus il y a déjà 7 ans et dans un bien meilleur état. Et surtout assurez-vous que le prix est négociable avant de vous déplacer à la Réunion parce que vous risquez de déchanter en arrivant ici : les propriétaires vous rétorquerons qu'ils préfèrent garder "Fine Pitch" plutôt que de baisser le prix ! Donc négociez fermement et obtenez un accord de principe sur le prix avant de prendre l'avion. Cheers.